Lydia Lundstedt a déjà examiné l’arrêt CJUE C-399/21 IRnova AB contre FLIR Systems AB (qui avaient été des partenaires commerciaux dans le passé) ici. Les tribunaux suédois sont clairement occupés à renvoyer les éléments de droit international privé des affaires de brevets à la CJUE.
Il convient de noter en particulier qu’une chambre à 3 juges semblerait avoir exclu l’effet réflexif avec autant de désinvolture que s’il s’agissait d’écraser une mouche.
Le 13 décembre 2019, IRnova a introduit une action devant le Tribunal des brevets et du marché visant, entre autres, à faire déclarer qu’elle avait un meilleur droit sur les inventions couvertes par des demandes de brevet internationales, complétées par la suite par des demandes de brevet européen, américain et chinois déposées par FLIR en 2015 et 2016, et par des brevets américains accordés à FLIR sur la base de ces dernières demandes. À l’appui de cette action, IRnova avait indiqué, en substance, que ces inventions avaient été faites par l’un de ses employés, ce qui signifiait que cet employé devait être considéré comme leur inventeur ou, à tout le moins, comme leur co-inventeur. IRnova a donc fait valoir qu’en tant qu’employeur de l’inventeur et donc ayant cause en titre, elle devait être considérée comme propriétaire des inventions. Toutefois, FLIR, sans avoir acquis ces inventions ni autrement autorisé à le faire, a déposé les demandes en son propre nom.
Le tribunal s’était déclaré incompétent à l’égard des demandes de brevet chinois et américain, et des brevets américains, au motif, en substance, qu’il considérait l’action concernant la détermination de l’inventeur comme étant liée à l’enregistrement et à la validité des brevets, et il appliqué le L24(4) Lbis par réflexe. La Cour d’appel a renvoyé la question de l’effet réflexif à la CJUE, dans les termes suivants :
«Une action en déclaration de meilleure qualité d’une invention, fondée sur une revendication d’inventeur ou de co-inventeur selon des demandes de brevet nationales et des brevets enregistrés dans un État tiers, relève-t-elle de la compétence exclusive au sens de l’article 24( 4) de [the Brussels Ia Regulation]?’
cependant la CJUE a reformulé [22-24] le cas comme ne concernant pas du tout l’effet réflexif, plutôt, s’enquérant de la portée de la passerelle A24(4).
La Cour d’abord [25] ff tient à confirmer sa lecture large de l’élément « international » requis pour déclencher le droit international privé européen, se référant à la CJUE Owusu.
Alors [35] semblerait exclure la réflexivité de manière très factuelle (et comme Lydia l’a également noté, sans AG Opinion):
ainsi qu’il a déjà été relevé au point 26 du présent arrêt, les demandes de brevet en cause au principal ont été déposées et les brevets concernés ont été délivrés non pas dans un État membre, mais dans des pays tiers, à savoir les États-Unis et la Chine. Toutefois, l’article 24, paragraphe 4, du règlement Bruxelles I bis n’envisageant pas une telle situation, cette disposition ne saurait être considérée comme applicable au litige au principal.
Cela a peut-être déjà répondu à une question centrale dans BSH Hausgeräte contre Aktiebolaget Electrolux .
[36] ff il renvoie entre autres à la CJUE Hanssen et au caractère exceptionnel de A24 [39]. Il tient que [42]
le litige au principal ne porte pas sur l’existence du dépôt d’une demande de brevet ou de la délivrance d’un brevet, sur la validité ou la caducité d’un brevet, voire sur un prétendu droit de priorité en raison d’un dépôt antérieur, mais sur la question de savoir si FLIR doit être considéré comme titulaire du droit sur les inventions concernées ou sur une partie de celles-ci.
[47] il se réfère entre autres au fait que le fait que
un examen des revendications du brevet ou de la demande de brevet en cause peut devoir être effectué à la lumière du droit matériel des brevets du pays dans lequel cette demande a été déposée ou ce brevet a été délivré [however it ] ne requiert pas l’application de la règle de compétence exclusive prévue à l’article 24, paragraphe 4, du règlement Bruxelles I bis
Très pertinent et étonnamment succinct sur la question de la réflexivité.
Geert.
Droit international privé de l’UE, 3e éd. 2021, 2.208 et 2.548.

